I-boycott, la plateforme de campagnes participatives qui donne le pouvoir aux citoyens

Levent Icar, le co-fondateur lors d’une conférence. Sur le panneau est écrit « Chaque fois que vous dépensez de l’argent, vous votez pour le type de monde que vous voulez » (Anna Lape). (Crédit : I-boycott)

I-boycott est une plateforme citoyenne participative qui vise à dénoncer par l’appel au boycott des scandales économiques, sociaux ou environnementaux par le refus de consommer certains produits. L’impact espéré est d’ouvrir un dialogue avec les entreprises visées pour les amener à changer leurs pratiques. En parallèle de leur participation aux campagnes de boycott, les citoyens peuvent également proposer des alternatives de consommation responsables. Toutefois, ce type d’engagement soulève des questions notamment éthiques. Levent Acar, co-fondateur de I-boycott a accepté de répondre à nos questions.

Si les campagnes sont mises en place à l’initiative des citoyens, est-ce que I-boycott a un rôle dans la vérification des sources, afin d’assurer la légitimité des campagnes publiées ?

Sur notre plateforme, il existe deux types de campagnes. Les premières, lancées par des associations comme L214 (ndlr : association de protection animale), sont directement publiées car ils considèrent qu’ils ont de plus grosses responsabilités. Les deuxièmes, lancées par les citoyens, passent par une période d’incubation.

L’incubation d’une campagne comprend elle-même trois étapes : Une première publication où les citoyens peuvent donner leur avis concernant la campagne lancée. Cela permet entre autres d’empêcher le dénigrement d’une entreprise, les discriminations ou autres dérives malveillantes. Ces avis permettent de soulever des points d’amélioration de la campagne. L’auteur de la campagne est donc invité à prendre en compte ces remarques et à modifier cette dernière en conséquence.

Enfin, une fois ces deux étapes passées, la campagne est prête à être « propulsée ». Durant cette période, chaque citoyen peut donner son avis en allant dans l’onglet « Évaluer » du site, prévu à cet effet. Une fois qu’elle a été approuvée par au moins 1000 personnes, elle peut être publiée et divulguée sur les réseaux sociaux. 

Une fois que la campagne est publiée, chaque citoyen, ou « boycottant », peut apporter des précisions aux informations transmises. Tout cela assure donc la légitimité du processus grâce à des sources sûres, vérifiées et approuvées.

Est-ce qu’I-boycott à un droit de veto quant aux propositions de campagne, notamment si celles-ci ne respectent pas certains aspects éthiques ou autres ?

Oui, I-boycott peut mettre un veto notamment si celles-ci ne respectent pas la loi ou si elles enfreignent quelques règles basiques. Néanmoins, cela n’est jamais arrivé.

Lorsque vous parlez de campagnes illégales, on imagine que vous faites référence au boycott des produits d’Israël en 2005 ?

Oui, aujourd’hui en France on ne peut pas boycotter un pays car cela est considéré comme discriminatoire. Mais jusque-là, personne n’a proposé une campagne contre un pays. Tout cela assure donc un boycott bienveillant.

Voir l’encadré à la fin de l’interview pour plus d’information sur le boycott des produits d’Israël.

Aujourd’hui, votre association fonctionne à petite échelle. Si un jour elle atteint la taille d’une ONG comme celle de Greenpeace et que le président de I-boycott se trouve être ami avec le PDG de Total, comment pouvez-vous assurer que l’intérêt privé ne l’emportera pas sur l’intérêt public ? 

C’est très simple. Aujourd’hui le processus décisionnel est décentralisé au niveau des utilisateurs. En effet, la seule manière de clôturer une campagne de boycott est lorsque la majorité des boycottants sont convaincus de la réponse des entreprises et qu’ils décident de clôturer la campagne. Ainsi cela garantit le respect de l’intérêt commun.

Est-ce que I-boycott engage un suivi des pratiques des entreprises une fois qu’une campagne est clôturée et si celle-ci respecte ses engagements auprès des boycottants à changer ses pratiques ?

I-boycott n’a pas les moyens de suivre exactement les pratiques de chaque entreprise. Ainsi, nous nous basons sur l’intelligence collective.

En effet, si une entreprise a réussi à convaincre les boycottants mais qu’elle ne tient pas du tout ses engagements, cela se traduirait directement par la création d’une nouvelle campagne. Elle aurait alors totalement perdu sa crédibilité auprès des consommateurs. Lorsque les marques parlent avec les consommateurs, elles n’écrivent pas seulement un communiqué de presse. Elles doivent les convaincre.

Il y a donc un niveau de confiance élevé qui permet d’assurer que l’entreprise ou la marque suive ses engagements. L’intelligence collective garantit le respect de ses engagements par l’entreprise.

A ce jour, 45 campagnes ont été levées et 8 d’entre elles ont abouti à une victoire comme par exemple celle contre Petit Navire, le zoo de Fréjus ou Philips.

*Boycott des produits d’Israël : Plus haut dans l’interview, Levent Acar fait référence aux boycotts contre Israël, lancés par la campagne BDS (Boycott Désinvestissement et Sanction), qui voient le jour en 2005. L’objectif de ces boycotts étaient la « lutte contre Israël et sa politique » comme l’indique leur site internet. Cependant, ces boycotts, aujourd’hui encore, appellent à de nombreux débats, notamment sur la question de la légalité ou non de ces pratiques. En 2015, un arrêt de la Cour de Cassation tranche, et interdit l’appel au boycott dans le but de lutter contre la politique d’un pays. Pour en savoir plus : Jean Baptiste Jacquin, « l’appel à boycotter Israël déclaré illégal », Le Monde, Novembre 2015. 

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