En Europe, plus de 5,8 millions de tonnes de vêtements sont jetés chaque année. Seulement, moins d’un quart d’entre eux sont aujourd’hui recyclés. Nous ne pouvons donc plus ignorer l’impact de cette industrie sur l’environnement.
Le principe même de la mode est d’acheter, de jeter et de racheter, pour être sans cesse au goût du jour. La mode, et en particulier, les « fast-fashion » commencent à se lancer dans une démarche éco-responsable. Mais est-ce une véritable prise de conscience de leur part, ou un simple levier de communication ?
« Ce n’est pas de l’économie circulaire à proprement parlé »
Les grandes entreprises de « fast-fashion » telle qu’H&M ou ASOS ont bien compris qu’il était temps de modifier le processus de production de leurs vêtements. Elles, qui sont habituées à produire en masse et de vendre à petits prix, ont décidé de prendre un virage dans leur manière de procéder. En effet, l’entreprise H&M, a lancé, il y a cinq ans, une récolte de vêtements dans leurs boutiques, ayant pour but d’être transformés et remis en vente : « Nous proposons la collecte de textiles pour éviter le gaspillage et pour préserver les ressources naturelles », justifie Rémi Crinière, responsable RSE d’H&M. Seulement, la mode est un secteur qui pollue beaucoup mais qui a du mal à s’implanter dans une démarche responsable…
C’est pourquoi, Greenpeace a décidé de lancer un défi à ces grands groupes de mode : une mode sans toxiques d’ici 2020. L’économie circulaire est donc née en réponse à ce mode de production abusif. « Cette nouvelle économie repose sur le principe de réutilisation de la matière ou du produit avant sa destruction finale. Il met notamment l’accent sur de nouveaux modes de conception, production et de consommation, le prolongement de la durée d’usage des produits, l’usage plutôt que la possession de biens, la réutilisation et le recyclage des composants. », explique Stéphane Murignieux, le directeur de la communication de l’Institut national de l’économie circulaire.
Mais, c’est aussi et surtout un gros tremplin financier pour la marque H&M, explique Stéphane Murignieux, « Ils vous reprennent vos vêtements mais ne se servent que de quelques bouts de tissu pour refaire leur collection. Le reste, il est revendu à leur profit ! ». Par ailleurs, la marque revendique sa prise de conscience grâce à sa collection « Conscious » qui est réalisée exclusivement à base de matières éco responsables comme le coton biologique et le polyester recyclé. Mais est-ce vraiment possible de se vanter d’une pareille collection alors que pour fabriquer un jean, 11 000 litres d’eau sont utilisés ? Le calcul va très vitre lorsque l’on sait que la marque vend une vingtaine de jeans différents en magasin.
Et ce coton biologique alors ? Cette matière vient du Bangladesh et est fabriquée par des jeunes ouvrières, souvent mineures, dans des usines dont elles sont prisonnières. Alors certes, certains français commencent à se lancer dans le coton biologique, mais ces petites entreprises ne pourraient pas encore fournir les fast-fashion en forte demande de ce coton si particulier. Par ailleurs, le coût de production du coton biologique français reviendrait beaucoup plus cher que celui provenant d’Asie. Alors H&M met toutes les chances de son côté en promettant une collection responsable et inscrite dans l’économie circulaire, mais selon Stéphane Murignieux « Ce n’est pas de l’économie circulaire à proprement parler. Nos grands-parents, eux, en faisait déjà de l’économie circulaire : en rafistolant un vêtement usagé pour le faire durer plus longtemps. Là, H&M reproduise encore des nouveaux vêtements sans recycler de manière visible les anciennes collections. ». Toutefois, certaines entreprises de mode le font, en revendant les vêtements usagés, mais celles-ci restent tout de même très petites face aux géants de la mode.
Une prise de conscience est née !
Greenpeace a donné un véritable coup de pied dans la fourmilière en lançant le pari aux grands groupes de mode de révolutionner cette industrie, d’ici 2020. Même si l’économie circulaire n’est pas forcément adaptable à la mode, il faut noter la prise de conscience de ces entreprises qui n’ont pas eu peur de bouleverser leurs codes, même si « c’est loin d’être gagné », selon le directeur de communication de l’Institut de l’économie circulaire, « pour le moment c’est plus un coup de communication pour les marques qui veulent sensibiliser un nouveau public, mais ce qu’il faut noter c’est la réelle prise de conscience qui sonne un nouveau départ pour l’industrie du textile. », continue-t- il.
Mais la question est : combien de Français seraient prêts à payer 300 euros pour avoir un jean fait à 100% en matière responsable ? Parce que le coton biologique a un coût. La solution se porterait peut-être sur le choix d’une économie adaptable aux « fast-fashion ». L’économie de fonctionnalité, par exemple, qui repose sur la vente de l’usage du bien et non plus par la vente du bien. L’avenir de la mode serait-il, à terme, de partager un seul dressing pour tous les français ?