Le Service National Universel : une dimension sociale et solidaire oubliée ?

(Crédit : Dossier de presse SNU)

Le nouveau service national voulu par Emmanuel Macron a été expérimenté en juin 2019. Le gouvernement a insisté sur le caractère universel de ce service qui devrait être généralisé en 2021, à tous les jeunes de 16 à 18 ans. Cette phase d’expérimentation semble encourageante pour le ministère de l’Éducation et de la jeunesse mais certaines associations ne sont pas du même avis. 

C’est un défi de taille auquel s’est attaqué le secrétaire d’Etat chargé de la jeunesse, Gabriel Attal : réconcilier les Français avec le service national universel (SNU). Après la disparition du service militaire en 1997, il faut dépoussiérer ce concept et l’adapter à la nouvelle jeunesse française. L’engagement n’est plus guerrier mais patriote. Le service n’est plus masculin mais désormais ouvert à tous. Enfin, il est destiné à des lycéens et non plus à de jeunes adultes de 19 – 20 ans. C’est donc toute une structure qui doit être repensée.

La mixité sociale en ligne de mire

Les jeunes français sont toujours plus nombreux à suivre un cursus dans le supérieur. La durée du service national universel est donc plus courte que son ancêtre. L’engagement passe d’une année à un mois. Il se divise en deux étapes de deux semaines. La première est la phase de cohésion. Antoine Lesieur, collaborateur de Gabriel Attal, parle de celle-ci comme d’un « projet en même temps ». C’est-à-dire que d’une part, le SNU va inculquer des valeurs républicaines aux jeunes volontaires. C’est sur cet aspect qu’il se rapproche du service militaire, renforcé avec le port d’un uniforme et le chant quotidien de la Marseillaise.

D’autre part, comme le souligne ce dernier : « Cette première phase s’inscrit dans une logique de mélange social ». Le service recherche une visée sociale avec la mise en place de brigades composées de jeunes de milieux sociaux et géographiques différents. Une enquête de l’institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire (INJEP) appuie les propos du collaborateur puisque 23% des volontaires déclarent que la mixité sociale est l’objectif le plus important du SNU.

Néanmoins, de nombreuses organisations comme la Fédération des associations générales étudiantes ( FAGE ) dénoncent un aspect parfois trop militarisé de ce séjour de cohésion. La FAGE parle d’une « dimension (…) punitive » et déplore la volonté affichée du SNU de « Recadrer la jeunesse ». Mais les principaux points de contestations se fixent sur la deuxième phase du service.

Une seconde phase dans le flou

Appelée « Mission d’intérêt général », cette seconde étape du SNU doit s’effectuer dans les mois suivant le séjour de cohésion. Comme l’explique le ministère de l’Education nationale et de la jeunesse, il s’agit d’un engagement de deux semaines dans une association, une collectivité territoriale ou encore dans un corps en uniforme. L’enquête de l’INJEP indique que 1260 des 2000 volontaires ayant expérimenté le SNU souhaiteraient réaliser cette mission dans le milieu de la Défense.

Dans cette nouvelle version, la mission d’intérêt général devrait aussi contribuer à l’économie sociale et solidaire. Dans la vidéo de promotion, on voit d’ailleurs des jeunes venant tenir compagnie à des personnes âgées ou encore nettoyer une forêt. Mais les chiffres prouvent que l’orientation vers les acteurs de l’ESS est restreinte. Selon l’INSEP, seuls 19% des jeunes souhaitent s’engager dans un projet de solidarité avec des personnes en difficulté sociales.

La source du problème serait structurelle d’après la FAGE puisqu’un flou entoure la seconde phase. « Peu d’informations claires, qu’il s’agisse des conditions et structures d’accueil, ou encore des types de missions offertes par ces jeunes et de l’accompagnement dont ils disposent». On peut donc facilement penser que les jeunes se dirigent vers les institutions de Défense ( Gendarmerie, Caserne de Pompiers, … ) car l’encadrement par l’Etat y est total. Or, dans les associations de l’ESS, la collaboration pour la mise en place de ce service semble encore minime.

La FAGE souligne que les services civiques préexistants sont plus efficaces dans la vie associative. « L’association accueille (…) plus de 70 services civiques sur l’ensemble du territoire français. Au sein de nos épiceries sociales et solidaires bien sûr, mais sur des missions d’orientation ou encore de promotion de la culture également ». C’est donc dans ce sens que la fédération a adressé au ministère une lettre ouverte l’interrogeant au sujet de l’absence d’aide au développement du service civique, ayant déjà fait ses preuves dans le domaine social. 

Dernier point la question économique fait débat. De nombreux syndicats étudiants font entendre leur colère car le SNU coûte 2000€ par volontaire, et d’ici 2025 ils seront 800 000. D’après l’agence Reuters, à terme c’est 1,5 milliard d’euros qui seront investis. Alors que les problématiques de précarité étudiante ne cessent d’apparaitre, cet investissement paraît incohérent dans une Education nationale en manque de moyen. 

LAISSER UN COMMENTAIRE

Please enter your comment!
Please enter your name here