Depuis 2014, PariSolidari-Thé, créé par Flora Doubilet, apporte une nouvelle image de la ville de Paris. L’objectif de cette petite entreprise : faire découvrir des initiatives positives et solidaires au travers de jeux de pistes et de rencontres.
En seulement quelques années, PariSolidari-Thé a permis à de nombreuses personnes, notamment des Parisiens, de découvrir Paris sous un nouveau jour. Des parcours dans divers arrondissements sont organisés par Flora Doubilet, créatrice de cette jeune entreprise, pour permettre à ceux qui en ont l’envie de pousser la porte d’initiatives solidaires et de partager un moment convivial.
Du tourisme solidaire
PariSolidari-Thé est une tout autre façon d’arpenter les quartiers de Paris mais pas que. Il s’agit également de créer du lien pour des personnes à la recherche de nouvelles rencontres. « Il y a beaucoup de gens qui sont seuls, qui ne sortent pas de chez eux. C’est aussi une manière de lutter contre l’isolement. Je voulais créer ces rencontres dans la rue, dans des lieux déjà existants. Les gens peuvent se rencontrer n’importe où, il faut juste prendre le temps de s’arrêter, de discuter et de faire connaissance », explique Flora. Un moment de partage qu’elle associe à des jeux de pistes toujours dans un souci de solidarité. Ici, c’est ouvert à tous, « de 6 à 100 ans » comme le dit Flora, mais les plus adeptes de ce genre d’activités sont davantage les jeunes entre 20 et 30 ans et les seniors de 60 à 70 ans. « Il faut que les gens osent venir seuls. Si jamais on vient de débarquer sur paris, c’est l’occasion de rencontrer d’autres Parisiens. » L’objectif est de découvrir des initiatives locales et positives – deux, trois quatre ou plus – en équipe, au travers d’un parcours de deux-trois heures. « Petit à petit, je me suis plongée dans tout ce qui était économie sociale et solidaire. J’ai voulu mettre en avant ces initiatives positives car on n’en parle pas assez. » Pour chaque arrondissement, un thème est proposé : la campagne à Paris, le village street-art de Paris, Paris solidaire et insolite…
C’est en août 2014, qu’elle organise son premier événement. « Je me suis dit : quand on achète sa baguette, on ne voit jamais le boulanger, il est dans les coulisses en quelque sorte. Je trouvais ça dommage qu’on ne puisse pas lui parler. » Elle débute donc son aventure chez un boulanger, le but étant d’apprendre à faire sa baguette, de partager sa passion, de pouvoir discuter et de voir comment il travaille.
Un parcours qui se crée en plusieurs étapes (une étape, une initiative locale) où les participants sont amenés à rencontrer différentes personnes sur leur chemin. Grâce à une feuille de route, ils explorent le quartier et partent à la découverte d’un restaurant associatif par exemple… Flora travaille avec une cinquantaine de partenaires, indispensables à la création de ses parcours. Le 56 en fait partie. Il s’agit d’un jardin partagé, caché entre deux immeubles. « Je cherche beaucoup de lieux un peu insolites. J’aime embarquer les gens, qu’ils soient surpris, émerveillés. L’idée c’est vraiment d’être étonné mais aussi de se dépayser, d’oublier que l’on est à Paris. »
La solidarité, un enjeu majeur
Sur le chemin, artisans, commerçants… des passionnés du quartier qui ont toujours quelque chose à raconter, à faire partager. C’est peut-être l’occasion de faire la rencontre d’un ébéniste pour apprendre à bricoler et fabriquer des meubles ou de participer à des ateliers pour réparer son propre vélo. « Il y a vraiment un aspect participatif qui m’a beaucoup intéressé », indique Flora. Pour certains, c’est un prétexte pour sortir de chez soi, la proximité du parcours ayant fortement jouée, pour d’autres, c’est une rencontre avec un nouveau Paris, une façon moins touristique d’apprécier ce que la ville a à offrir.
Le bouche à oreille est l’un des principaux vecteurs qui permet de faire connaître et parler de PariSolidari-Thé. Le réseau est important pour faire croître une petite entreprise comme celle-ci. Rébéca Etienne travaille pour « La Cloche », une association qui cherche à réhabiliter l’image des plus démunis. Pour le circuit dans le 14e arrondissement, elle était l’un des acteurs du parcours. Cette fois, elle inverse les rôles en devenant une participante. Pour Elsa Delouche, venue en couple avec Mathieu rousseau, c’est un peu différent. Celle-ci a connu Flora Doubilet en étant « sa voisine de bureau ». Les deux jeunes femmes travaillaient dans le même espace de coworking.
Claire Melletier et Déborah Daubert, deux jeunes amies, sont venues ensemble et c’est une première pour l’une comme pour l’autre. « C’est original pour découvrir Paris et se balader. Il y a le côté solidaire qui nous a un peu intrigué aussi. Le parcours dédié au 20e arrondissement à l’air sympa et on a envie de passer du temps avec des gens que l’on ne connaît pas, » expliquent-t-elles. Pour Claudie et Alain Bouland, un couple d’une soixantaine d’années, c’est surtout le côté insolite qui les a attiré. « C’est une façon un peu différente de visiter. Si on regardait uniquement une carte, on ne verrait pas forcément tout ce que nous fait voir Flora. Elle attire notre attention sur certains aspects du quartier, » indique Claudie. Son mari continu en disant : « on se retrouve toujours dans des groupes et souvent avec des plus jeunes que nous. » C’est aussi cela l’aspect solidaire : des individus de tout âge qui se mélangent et font connaissance le temps d’une brève rencontre.
En tout cas, tout le monde, ou presque, est d’accord pour dire que c’est une autre manière de rencontrer de nouvelles personnes, tout en restant à un degré relationnel très éphémère. « On a participé à plusieurs circuits. Sur deux ans, nous sommes venus cinq ou six fois mais on ne retrouve pas les mêmes personnes une fois sur l’autre, » continue Alain Bouland. Pour Florence Béchaine et Rébéca Etienne, c’est l’inverse : « la première fois, je ne m’attendais pas du tout à rencontrer des gens. Je n’étais pas du tout venue pour ça à la base, » révèle Florence. Rébéca enchaîne en expliquant que ce n’était pas non plus son intention première. « Au départ, je suis venue pour découvrir un arrondissement. Ce n’est pas la dimension rencontre qui m’intéressait le plus. »

PariSolidari-Thé et plus encore
La créatrice de PariSolidari-Thé va encore plus loin en proposant une balade achetée, une balade offerte… « Il y a le café suspendu qui existe, c’est un concept qui vient d’Italie qui est de plus en plus mis en place. Ici, c’est le concept des places des jeux de pistes suspendus, » explique Flora. L’idée est qu’une personne réserve sa place sur internet tout en réservant une seconde place en plus qui sera offerte à quelqu’un qui n’a pas les moyens de participer. Il s’agit d’une place suspendue achetée par l’un des participants et redistribuée par la suite lors d’un des événements, le samedi étant réservé aux particuliers.
En effet, le week-end, à l’occasion d’anniversaires ou d’enterrements de vie de célibataire, il est possible de privatiser un parcours. Dans ce cas, Flora personnalise la feuille de route en menant sa petite enquête. « J’ai un complice et je lui envoie un petit questionnaire pour que l’événement ressemble vraiment à la personne concernée. Je veux qu’elle se dise qu’il a été conçu spécialement pour elle. Pour ça, je mets des petites anecdotes dans la feuille de route. »
La semaine, Flora travaille pour les entreprises. Il s’agit de parcours déjà existants qu’elle peut adapter sur-mesure. « Je vois avec les clients ce qu’ils ont besoin, ce qu’ils veulent, combien ils sont. Mais il peut y avoir des créations de parcours… Un jour, un chef d’entreprise m’a dit qu’il aimerait recréer du lien au sein de son entreprise avec ses collaborateurs. Je me suis dit que c’était une démarche intéressante et que pour une entreprise, il fallait quelque chose de ludique. J’avais envie qu’ils se sentent inspirés, qu’ils soient presque transformés à la fin, qu’ils sortent de leur contexte habituel, de leurs repères et c’est là que m’est venu l’idée du jeu de piste, » raconte Flora. Celle-ci propose une sorte de sensibilisation ludique, informelle et conviviale pour faire de nouvelles rencontres, découvrir des quartiers et pourquoi pas apprendre des choses sur l’économie circulaire ou encore le développement durable. « C’est une véritable ouverture d’esprit. Ce qui m’intéresse, c’est de voir qu’il y ait des gens qui ne se connaissaient pas ou peu alors qu’il travaillaient ensemble mais qu’à la fin du parcours, il y ait une véritable entente, que l’on ne sache plus qui est venu seul ou en groupe. »
Des événements tous les mois
PariSolidari-Thé compte aujourd’hui 12 parcours à Paris (3e, 9e, 12e, 13e, 14e, 15e, 19 et 20e arrondissement) et un à Ivry. Flora travaille déjà sur un nouveau dans le 18e arrondissement qui verra bientôt le jour. La création d’un circuit est assez collaborative. «Souvent les participants me donnent des contacts, me parlent de lieux qu’ils connaissent, qu’ils affectionnent et qui pourraient m’intéresser. Je ne suis jamais seule à créer un parcours au final. C’est grâce aux gens et à mes partenaires que j’arrive à organiser tout ça.» Un travail collectif qui se construit aussi à l’aide d’une équipe d’animateurs présents tout au long du jeu de piste. Il y a deux parcours tout public par mois le samedi et peut compter entre 15 et 20 personnes voir plus. Les arrondissements varient à chaque fois. Pour des événements d’entreprise, cela peut aller jusqu’à 60 participants. Dans ces cas-là, les animateurs sont indispensables pour le meilleur déroulement possible.