Créé en 2007, Emmaüs Défi est un laboratoire d’innovations sociales qui a pour seule et unique ambition de lutter contre la grande exclusion sociale. Nous nous sommes rendus dans la plus grande boutique d’Ile de France, située au 40 rue Riquet pour nous entretenir avec la responsable opérationnelle et les salariés en chantier d’insertion.
Tout a commencé en 2006 lorsque Emmaüs a été interpellé par le nombre de sans-abri installés en métropole et plus particulièrement en région parisienne. Le mouvement a voulu proposer aux personnes en précarité une solution pour retrouver un statut dans la société et ne plus en être exclues. “Nous avons commencé à embaucher des gens en chantier d’insertion sur les activités principales d’Emmaüs, à savoir la collecte, le tri, la mise en rayon et vente. Nous formons également certains d’entre eux à la couture dans la boutique à côte, le 104”, explique Astrid, la responsable opérationnelle du magasin Emmaüs Défi, rue Riquet à Paris.
Mais très vite, l’association a pris conscience que son initiative était vaine : “Nous voulions avant tout proposer aux personnes sans domicile du travail et les accompagner vers une réinsertion professionnelle, explique Astrid, mais nous avions en face de nous des gens avec un passif très lourd. Beaucoup d’entre eux ont connu la misère, la vie dans la rue et il fallait qu’Emmaüs agisse sur d’autres points majeurs à savoir les accompagner pour trouver un logement, les aider à régler leurs problèmes de santé mais aussi de papiers”. Emmaüs Défi a donc mis en place ‘Convergence’ en 2012 (un dispositif qui propose un accompagnement global) ainsi que la ‘Banque solidaire de l’équipement’ (un service permettant aux personnes qui accèdent à leur premier logement d’acheter à petits prix du matériel neuf de première nécessité).
Petit à petit, le mouvement Emmaüs Défi a su appréhender toutes les problématiques de ces personnes en grande exclusion. “On s’adapte à chaque profil : ceux qui veulent travailler quelques heures ou ceux qui sont motivés à en faire plus. Il faut être patient, leur apprendre ou leur réapprendre les règles du travail comme être à l’heure par exemple. Nous avons mis en place des équipes d’accompagnement pour les aider à se réintroduire petit à petit dans la société”.
Emmaüs Défi se dit fier du parcours entrepris jusqu’ici : dans cette boutique solidaire, 140 personnes sont en insertion professionnelle et 60 autres sont des salariés permanents. “Grâce aux dons, mais aussi grâce à nos différents partenaires, nous arrivons chaque jour à trouver de nouvelles solutions pour des personnes en grande exclusion mais il y a encore tellement de gens dehors. Il y a encore beaucoup de demandes et le délai d’insertion peut en décourager plus d’un”.
Dominique, 48 ans, n’a jamais baissé les bras. Il suit le chantier d’insertion depuis déjà 4 ans : “Mes parents m’ont mis dehors à l’âge de 16 ans. Ma vie, je l’ai presque toujours passée dans la rue mais je me suis toujours battu pour m’en sortir. J’ai vagabondé à droite à gauche pour trouver un endroit où dormir, où manger, où travailler”. Cet ancien sans-abri a retrouvé une situation décente : “Je travaille pour Emmaüs Défi 26h par semaine, je suis nourri, logé et rémunéré, environ 840 euros par mois. Mais le chantier d’insertion ne dure que 5 ans et chaque jour je me rapproche de la fin. J’ai très peur de l’avenir mais on m’a toujours dit que j’étais fort et jusqu’à aujourd’hui, j’ai toujours su rebondir”.