Comment le trafic des animaux est devenu un business lucratif pour les animaleries ?

Le trafic d'animaux se place en 3e position derrière celui de la drogue et des armes. ©Winsker

En Europe, le trafic des animaux est toujours un marché actif et lucratif. Conditions d’hygiène et d’élevages désastreuses, maladies, prix d’achat attractifs… Tous ces points ont permis à ce commerce illégal de faire fructifier un business inhumain dans certaines animaleries et élevages français. 

En France, un foyer sur deux possède un animal de compagnie, et leur nombre serait de 63 millions, soit quasiment le même que la population française. Mais sur les 20 millions de chiens et chats, plus de 50 000 sont arrivés illégalement sur le territoire, selon la Brigade nationale d’enquêtes vétérinaires et phytosanitaire (BNEVP). Aujourd’hui, le trafic d’animaux se classe en 3e position, après celui des armes et de la drogue, et la demande en Europe ne cesse d’augmenter. En 2018, l’ONG de défense des animaux, Four Paws, a recensé environ 8 millions de chiots mis en vente sur des sites internet, avec un bénéfice alunissant d’un milliard d’euros.  

L’Europe de l’Est premier sur le trafic d’animaux 

La plupart de ces trafics proviennent des pays de l’Europe de l’Est, dont la Pologne, la Hongrie, la République Tchèque, la Roumanie, la Bulgarie et la Slovaquie. Une expertise de la SPA a montré que la plupart de ces élevages « viennent majoritairement de batterie, sans aucun contrôle sanitaire et de reproduction intensive ». Les conditions d’élevages et d’hygiènes sont souvent catastrophiques : entassements des animaux dans un espace réduit, enclos à ciel ouvert, mélange de races, prolifération de maladies, aucun vaccin réalisé… 

Cependant, ce constat, établis par de nombreuses associations, ne fait pas baisser les ventes d’animaux de compagnie, au contraire, elles augmentent. Sur le DeepWeb, les acheteurs de refuges ou d’élevages peu scrupuleux peuvent trouver leur bonheur au moindre coût. Il suffit de rechercher la race que l’on souhaite avec le nom d’un pays d’Europe de l’Est. Les prix proposés sont cinq fois moins chers que ceux proposés dans les élevages éthiques. Depuis l’apparition des sites de vente internet dans les années 2000, comme Leboncoin ou Ebay, il est devenu très facile pour les propriétaires de petites animaleries françaises de se procurer de nombreuses espèces et races d’animaux des pays d’Europe de l’Est. Leur importation est généralement dirigée par des réseaux mafieux très organisés.

En Europe, la question de ce trafic est encore trop sommaire. Il n’existe aucune loi permettant d’instaurer une politique commune sur le transport des animaux sur le continent. Pourtant, bon nombre de propositions de lois ont été déposées par des députés européens. En 2016, une séance avait été ouverte sur une possible résolution sur l’identification des animaux domestiques. Mais rien de concluant, car un an après, la seule solution trouvée a été l’ouverture d’une plateforme européenne pour le bien-être animal.

Les sites de ventes sont de plus en plus prisés par les trafiquants d’animaux. © Claudia Wollesen

La philosophe, Corine Pelluchon, explique cette ingérence européenne dans la préface du livre L’Europe des animaux, en s’exclamant son désarroi face à cette ingérence diplomatique. « On ne parvient pas à dégager la moindre piste commune qui pourrait améliorer la condition des animaux, tout en tenant compte du contexte économique et social ».

En ce qui concerne les documents des animaux, ils sont tous quasiment falsifiés. Donc, il n’y a aucune possibilité de vérifier si le chiot a été vacciné, s’il est porteur ou non de la rage… Dans certains pays de l’Europe de l’Est, les vaccins se font à la chaîne, avec des produits périmés ou des contrefaçons. À cause de cette ingérence sanitaire, les animaux contractent des maladies contagieuses, mais peuvent également déclencher des troubles du comportement. 

Le transport peut dégrader énormément la santé des animaux. Ils sont entassés dans des cages, sans eau ni nourriture, pendant des journées. De plus, la plupart d’entre eux sont exportés très jeunes, et souvent non sevrés. Donc acheter un animal dans une animalerie n’est pas si éthique que ça pour le consommateur, car l’origine même de l’élevage de l’animal et sa santé sont inconnus aux yeux même de l’animalerie. 

La question des formations suivis par les employés de ces « supermarchés animaux&cie » est également un sujet tabou. Certaines entreprises sont peu regardantes sur les antécédents professionnels et/ou scolaires des futurs aide-soignants-vendeurs. Les professionnels du métier s’inquiètent sur les conditions sanitaires et sur l’aide vétérinaire que pratiquent les employés de ces commerces. La directrice de l’école supérieure de l’animal et du vivant de l’Institut Bonaparte explique qu’une formation vétérinaire est primordiale pour assurer une bonne santé ainsi qu’un bon traitement de l’animal. 

Des solutions, mais trop peux nombreuses 

Pour faire face à ce trafic, la SPA a créé la Cellule anti-trafic (CAT) en 1993. Le but de ce collectif est de repérer les différents trafiquants d’animaux. Leurs recherches se focalisent surtout en Europe de l’Est, où les ventes sont le plus couramment faites. Afin d’élargir leurs enquêtes, la CAT collabore avec les autorités publiques, dont les policiers, les gendarmes, les douanes… Mais la mission ne s’arrête pas là. Quand la CAT détecte un élevage douteux, il porte plainte pour maltraitance animale, ainsi que pour trafic illégal. 

Cependant, les affaires de ce type sont extrêmement longues à être clôturées. Les animaux sont quant à eux pris en charge par l’association SPA, afin d’être soignés et recueillis dans un lieu sécurisé. À ce jour, la CAT a réalisé plus de 300 affaires, dont la plus spectaculaire en 2014, avec la saisie de 219 chiens et chats, placé par la suite dans des refuges de la SPA. 

Les associations et certains partis politiques, comme le Parti animaliste, se battent pour redonner de l’humanité aux animaux. Certains s’associent pour combattre cette inégalité, comme le député européen, Pascal Durand, et le porte-parole de la Fondation Brigitte Bardot, Christophe Marie, dans leur livre « L’Europe des animaux ». Leur but est d’analyser le fonctionnement politique de l’Europe pour les animaux et quelles sont les modifications à établir. 

Les acheteurs doivent être plus vigilants pour leurs achats « coup de cœur » dans les animaleries. Continuer de consommer dans ces établissements profitera aux trafiquants et ces derniers continueront d’exporter des animaux illégalement.

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